Macho, homophobe, ça rend pas plus viril

DiscriminationsHomophobieSociété02/12/2013S’il y a un cliché qui revient sans arrêt dans la musique que je peux aimer et pratiquer c'est bien celui-ci : le bon gros gangsta entouré de bitches, pour bien afficher, jusqu'au grotesque, qu'il est "du bon côté de la barrière". Et oui, cette image là hante une énorme partie des vidéoclips de Rap US (et en France). Elle n'est pas nouvelle, ce qui ne doit pas nous empêcher de la remarquer, bien qu'elle représente une sorte de "norme".

Comment se fait-il que ce cliché soit aussi persistant ? Vaste question… A la base, la devise d'origine du Hip-Hop (mouvement culturel à l'origine du Rap, je le rappelle) "Peace, unity, love and having fun" ne laissait pas entrevoir la possibilité de telles dérives. Alors, on peut supposer que c'est au moment d'un développement médiatique et industriel de la musique Rap que les choses ont pu prendre de l'ampleur. L'exubérance, la course au plus "m'as-tu-vu ?'", l'égo masculin gonflé à bloc, peut-être aussi le fait qu'il y ait très peu de représentantes féminines (médiatisées, puisque c'est de là que vient "l'exemple" pour beaucoup)… Tout ceci semble faire partie de la "mayonnaise" qui a bien pris depuis des lustres.

Il y a également une autre dimension à prendre en compte : le contexte des quartiers difficiles. Il n'est pas dur de déduire qu'un contexte plutôt rude, faisant pression sur les mentalités, où le plus "solide" (en apparence) est censé garder la tête hors de l'eau, est on ne peut plus favorable aux travers machistes et homophobes. Je n'oublie pas de préciser que ces deux fléaux se retrouvent bien évidement dans d'autres couches de la société, même de manière plus sournoise ou d'apparence plus "présentable".

J'en reviens au machisme. Eternel besoin qu'ont certains hommes de "tirer la couverture" à la Femme pour exister, se sentir "un homme, un vrai". Dans leur conception des rapports avec cette dernière, il est établi qu'elle est "faite" pour se plier à leur exigences, ou même, qu'il n'y aurait pas d'exigences, puisque que "c'est comme ça depuis toujours". La femme-objet-potiche dans les clips, la femme qui pose à poil pour vendre… Tout commerce de ce genre n'a jamais eu d'autre finalité que de s'adresser à une clientèle d'hommes, en se servant de la Femme comme "argument" (fantasme) commercial. Il est toujours triste de constater que nombre de femmes jouent le jeu et acceptent implicitement le rôle de "dominée", allant même jusqu'à reproduire le discours du macho de base, par manque de conscience de leur condition. Juste une petite parenthèse ; celui qui a écrit cet article n'est pas un "ange", et a bien conscience qu'en certaines circonstances, il "profite" lui aussi de cette domination (pas pu m'empêcher de le signaler, mais je ne vais pas non plus étaler toute ma vie privée ici). Mais ce qui est encore plus triste, c'est d'avoir la mémoire courte, ou l'ignorance comme conseillère. J'ai maintes et maintes fois entendu ou lu des gens se plaignant vaguement des "féministes ci, les féministes ça…" Sans se douter ou se rappeler que si les femmes ont aujourd'hui acquis des droits, c'est bel et bien parce que certaines mobilisations de groupes d'inspiration "féministe" ont eu lieu par le passé.

Petite réflexion qui me hantait depuis quelques temps : pourquoi est-ce toujours uniquement aux femmes de "se respecter" ? Encore une marque de la domination masculine qui consiste implicitement à demander "plus" au sexe opposé. A l'inverse, on a jamais entendu dire qu'un homme ne se respectait pas en "louant un corps", dans le contexte de la prostitution (encore tout un débat enflammé !). Objectivement, on ne peut que constater que l'on demande bien plus souvent aux femmes de rendre des comptes sur leur "intégrité".

Tout ceci étant dit, je m'adresse maintenant sans détours à toi, mon cher portrait-type du jeune en "mâle" de virilité.

Sans doute as-tu écouté et vu nombreuses prestations d'un genre de rappeur faussement provocateur, puisque éternel recycleur de la vieille recette "cash, poufs et gros biscotos". Et oui, rien de subversif là dedans, mais ce n'est pas le sujet. Ne finirais-tu pas par croire que la réussite en tant qu'homme soit d'être ce qui ressemble à s'y méprendre à un beauf des temps modernes ? Je le crains… Ne finirais-tu pas par croire que plus tu "consommes" de femmes, plus tu es "supérieur" aux autres bonhommes ? Je le crains aussi… Oui, rassures-toi, je sais qu'il n'y a pas de honte à être attiré par les femmes. Mais de là à les considérer comme des biens à "posséder", afin d'assoir une réputation qui au fond ne te grandiras pas, sauf ton égo, n'est-ce pas légèrement puérile ? Devant mes questions et remarques quelques peu directes, te crispes-tu, comme quelqu'un que l'on placerait devant un miroir qui lui renvoie ce qu'il pourrait être ? Bon. Continuons…

… sur un autre sujet ô combien délicat : la religion. Je te préviens, je ne suis pas un bisounours, mais une personne objective. Chez ceux qui se disent Chrétien, Juif ou Musulman, il y a des machos partout. Et la ficelle reste la même : se servir/détourner la foi pour en faire un prétexte à domination masculine, dans une sorte de religion remixée "à la carte" (Bonjour, alors je voudrais une Femme qui ferme bien sa gueule s'il vous plait. Pour le reste, je verrais si j'ai le temps de potasser tout le bouquin sacré). Ce sont des interprétations de la religion dans lesquelles les autres ("vrais" si j'ose dire) pratiquants ne se reconnaissent pas en général. Et donc, toi ? Est-ce la spiritualité qui t'intéresses en premier, ou le fait que ta bobonne soit bien soumise au foyer ? Ah, je vois… Tu restes persuadé que chacun doit rester à sa "place", dans sa case prédéfinie.

Alors, à propos de ta fixette sur la classification des sexes, je vais justement évoquer un autre sujet fort délicat, surtout dans le Rap : l'homosexualité. Rien qu'à prononcer ce mot, je t'entends déjà ricaner bêtement… Moi ? Homosexuel ? Rien parce que j'évoque le sujet en voulant dénoncer son rejet ? Aller, si ça peut te faire plaisir, je le suis… Même si ce n'est pas le cas. C'est bon ? On peut poursuivre ? Je remarque que chez toi, l'emploi du mot le plus grossier (pédé) ne t'es pas forcément utile pour injurier (sur les forums Internet par exemple), puisque les mots homo/gay, sont déjà synonymes d'insulte dans ton esprit. C'est comme si, selon toi, cette orientation sexuelle serait en elle-même une insulte… (A l'humanité ?) Ce qui n'est pas rien, malgré que tu ne te rendes pas compte de ce que ça représente. Oui oui je sais, je te fais "la morale"… Mais en fin de compte, je ne fais que te tendre le miroir devant la tronche, ne m'en veux pas.

Mais dis-moi, comme toute personne à peu près normalement constituée, tu ne dois pas trouver très cool le racisme et l'intolérance en règle générale ? Le fait de juger durement, voire d'insulter des personnes (qui ne font la plupart du temps de mal à personne) sur ce qu'elles sont et n'ont pas choisi d'être… Hein, quoi ? Ça y est ? Tu vois où je veux en venir ? Tu vois le rapprochement ? Et oui, est-ce bien logique de trouver la stigmatisation des minorités craignos, si c'est pour en alimenter une soit-même ? Tu ne dois certainement pas aimer ce genre de spécimens (de bistrot ou d'ailleurs) à l'esprit étroit qui chope une allergie à chaque fois qu'on lui évoque un "type" de personne qui ne lui convient pas, ou qui piaille comme un animal lorsqu'on lui évoque l'égalité Homme-Femme… Et si je te disais que finalement, sur certains points, tu pourrais t'en rapprocher ? Noooooon ! Le cauchemar !

Je n'ai pas la prétention de détenir le pouvoir de te faire changer, mais voici les remarques que je pouvais t'adresser, et qui pourraient te revenir en pleine face de temps à autre, qui sait. Et non, tous les hommes ne sont pas courageux. Toutes les femmes ne sont pas "faibles par nature". Tous les homos ne sont pas les guignols que tu imagines en caricature. Inutile de jouer les Tarzan gonflés à la testostérone, car être macho ou homophobe, ça rend pas plus viril, mais simplement plus con.

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EXPLICITE